Mercredi 19 septembre, le groupe terroriste « Etat Islamique » (EI) a diffusé sur Internet une nouvelle vidéo de propagande montrant 3 combattants djihadistes présentés comme étant des citoyens français. Les 3 hommes – seulement identifiés sous leurs « noms de guerre » d’Abu Osama al-Faranci, Abu Maryam al-Faranci, et Abu Salman al-Faranci – y brûlent leurs passeports et leurs permis de conduire, et appellent leurs concitoyens musulmans à les rejoindre en Syrie ou à commettre des attentats sur le sol français. En dehors de leur langue, aucune indication ne permet à l’heure actuelle de confirmer la nationalité des 3 hommes, ou de déterminer leur identité réelle.
C’est la deuxième fois en moins d’une semaine que l’EI menace la France dans une vidéo propagée sur la toile islamiste, après l’apparition, dimanche 16 novembre, de Maxime Hauchard, alias « Abou Abdallah al-Faranci », et Mickaël Dos Santos, alias « Abou Uthman al-Faranci ». Les 2 jeunes convertis – reconnus publiquement par le parquet antiterroriste de Paris malgré la subsistance de certains doutes quant à l’identité de Mickaël Dos Santos (un message publié sur son compte Twitter jeudi 19 novembre nie sa présence sur la vidéo)– ont en effet pris part à visage découvert à la décapitation filmée de 18 soldats syriens, mise en scène en parallèle de l’exécution de l'otage américain Peter Kassig par le bourreau d’origine britannique connu sous le sobriquet de « Jihadi John ».
On notera que les profils de Maxime Hauchard et de Mickaël Dos Santos sont très similaires, tous deux étant des convertis âgés de 22 ans, déjà connus par la Direction Générale de la Sécurité Intérieure (DGSI), et faisant l’objet de mandats d’arrêt. Maxime Hauchard a par ailleurs déjà lancé plusieurs dizaines d’appels au djihad au cours des derniers mois via son compte Twitter.
Avec de telles vidéos, l’EI met donc une nouvelle fois son expertise de la communication au service de sa propagande terroriste. Alors que l’organisation a marqué plusieurs reculs sur le terrain – que ce soit en Irak avec la perte de la ville de Baïji et du barrage d’Adhaim, ou en Syrie avec la stagnation de ses combattants à Kobane – elle est en effet plus présente que jamais sur Internet grâce à ses bras médiatiques: « Al-Furqan », « Al-Itissam » et « Al-Hayat », responsable de la diffusion du web-magazine de propagande multilingue Dabiq.
De plus, des images aussi insupportables assurent à l’EI une présence constante dans les médias et dans les débats politiques occidentaux, le recrutement de jeunes sans histoire appelant évidemment une réponse des autorités publiques des pays concernés.
Le but premier de cette stratégie est d’attirer de nouveaux volontaires pour maintenir l’emprise djihadiste sur le territoire conquis tout au long de l’année 2014, et de compenser les pertes importantes subies depuis le début des frappes aériennes occidentales. Le groupe terroriste intensifie donc ses efforts de recrutement auprès de la jeunesse européenne, et singulièrement française, laquelle représenterait déjà la plus forte composante européenne au sein de ses rangs. En effet, la mise en scène de ressortissants occidentaux convertis à l’Islam et s’exprimant dans leurs langues nationales permet d’atteindre un nombre conséquent de jeunes « auto-radicalisés » ne parlant pas l’arabe et n’ayant aucune culture islamique.
Pour l’EI, la mise en avant de « coupeurs de têtes » européens est par ailleurs un moyen de mettre en place un processus d’identification avec des candidats djihadistes ne disposant d’aucune expérience préalable du combat. Dans ce contexte, on peut considérer que la violence radicale s’est muée en un nouveau langage permettant de s’adresser à des jeunes libérés de toute contrainte morale, qui vivent déjà une expérience virtuelle du djihad sur les réseaux sociaux.
Enfin, il est fondamental pour l’EI de poursuivre son escalade dans l’horreur médiatique pour prouver à ses sectateurs que l’intensification des frappes occidentales n’a pas affaibli sa détermination à étendre le territoire de son « Califat islamique », et à le nettoyer de la présence de tous les « ennemis de Dieu ».
En plus de lui assurer un flux constant de nouveaux combattant en provenance du monde entier, cette stratégie de communication a en effet permis l’organisation d’obtenir l’allégeance de nombreuses organisations terroristes, depuis le Maghreb et la zone sahélienne jusqu’à l’Asie du Sud-Est.
Dans les semaines à venir, devrait donc encore accentuer le rythme de diffusion de ces vidéos dans ces 3 objectifs : soutenir ses actions militaires, préserver son statut de fer de lance du djihadisme mondial, et déplacer le combat contre les états occidentaux sur le terrain qui est le plus favorable, à savoir la communication 2.0.