La Vidéo de Serge Lazarevic renouvelle l’attention des médias français envers AQMI



L’otage français Serge Lazarevic et un autre homme présenté comme l’otage néerlandais Sjaak Rijke sont apparus lundi dans une vidéo d’environ quatre minutes réalisée par le bras médiatique d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), « Al Andalus », et authentifiée dans la soirée par les services de renseignement français. Bien que la date de l’enregistrement du message ne soit pas connue avec certitude (Sjaak Rijke affirme qu’il parle le 26 septembre), cette vidéo constitue selon un communiqué publié dès lundi sur le site de l’Elysée « une preuve de vie récente qui était attendue depuis longtemps. »

Capturé le 24 novembre 2011 dans la localité malienne d’Hombori, Serge Lazarevic est en effet le dernier ressortissant français encore détenu en captivité par un groupe islamiste depuis la décapitation au mois de septembre en Kabylie d’Hervé Gourdel par le groupe algérien Jund al-Khilafa, qui est affilié à l’ « Etat islamique ». C’est aussi le dernier otage retenu au Sahel depuis la découverte du corps de son compagnon Philippe Verdon en juillet 2013. En mars de la même année, l’AQMI avait annoncé l’exécution de ce dernier, présenté comme un « espion », en représailles à l'intervention militaire française au Mali.

Cette nouvelle vidéo filmée à l’arrière d’un pick-up est la première dans laquelle apparait  Serge Lazarevic depuis la diffusion d’un message par la  chaîne de télévision de Dubai « Al-Aan » au mois de juin dernier. S’exprimant en français et vêtu d’un turban noir, il y déclare être « très malade », souffrant notamment des reins, d'hypertension, d'asthme et d’un ulcère au genou. Il estime par ailleurs que l'intervention française en Irak a mis sa vie en danger et il exhorte « solennellement » François Hollande à « tout faire pour le libérer ». « Vous avez libéré tous les Français, je suis le dernier. J'espère ne pas être le huitième des Français tués dans le Sahel, » lance-t-il ainsi à son adresse.

Le président français a réagit au message depuis l’avion le conduisant de Nouvelle-Calédonie à Sydney. Il s’est notamment interrogé sur les raisons qui ont poussé l’AQMI à réaliser et à diffuser cette vidéo, émettant l’hypothèse d’une « montée de l’horreur » dans le sillage des pratiques de l’ « Etat islamique » en Syrie et en Irak. Tout en dénonçant « le voyeurisme de la barbarie », il a néanmoins considéré que de tels messages soulignaient aussi la valeur que les ravisseurs accordent à leurs otages en tant que monnaie d’échange. On notera que François Hollande lui-même avait déclaré au cours de son intervention télévisée du 6 novembre que Serge Lazarevic était « sans doute » encore en vie.

Dans tous les cas, il faut remarquer que cette vidéo est apparue sur la toile islamiste alors que l’AQMI a perdu en visibilité au cours des derniers mois au profit de l’ « Etat islamique ». Depuis la proclamation du « califat » islamique par Abou Bakr al-Baghdadi en juin 2014, son organisation s’est affirmée comme le fer de lance du djihad global, recueillant un très grand nombre de déclarations d’allégeance ou de soutien de la part de groupes terroristes partout dans le monde, y compris dans la sphère d’influence traditionnelle de l’AQMI en Algérie et au Mali.

De plus, la multiplication des décapitations d’otages par les bourreaux de l’EI et les craintes sur la participation massive de ressortissants occidentaux aux exactions commises par le groupe terroriste en Syrie et en Irak ont accaparé l’attention des gouvernements et des médias. Cette semaine encore, l’EI a diffusé des images de la décapitation de l’otage américain Peter Kassig, à laquelle auraient pris part  au moins un Français, un Britannique et un Belge.

Si l’apparition de Serge Lazarevic peut donc être considérée comme une bonne nouvelle quant à d’éventuelles perspectives de libération suite à des négociations menées dans le contexte sahélien, il ne faut donc pas négliger les conséquences de ce climat de rivalités entre des organisations djihadistes. Dans le futur, cette situation pourrait en effet conduire à une course à la légitimité qui risque d’entraîner la multiplication des actes de violence extrême, avant tout à l’encontre des otages occidentaux.

FIN


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