La reprise des constructions dans les colonies menace la sécurité d’Israël



 

 

 

Le gouvernement de M. Netanyahu a donc, une fois de plus, cédé à son aile la plus radicale en mettant fin au moratoire sur la colonisation. Certes, le débat est souvent mal compris et déformé en Europe car il ne s’agit pas, pour l’essentiel – du moins à ce stade – de construire de nouvelles colonies ni réellement d’étendre le territoire de celles qui existent mais de construire à l’intérieur de celles-ci, afin de faire face à la poussée démographique. On remarquera également que cette annonce n’a pas donné lieu à un déferlement de bétonneuses et autres bulldozers sur les colonies qui comptent profiter de cette décision. Il n’empêche que l’option qui a été retenue est la mauvaise.

Elle est mauvaise parce que, sans nécessité politique, elle braque le partenaire palestinien moins de deux semaines après la reprise des négociations directes.

Elle est mauvaise car elle permettra, une fois de plus, aux ennemis d’Israël de vouer l’Etat hébreu aux gémonies.

Elle est mauvaise car elle envoie le mauvais signal : chacun sait que la paix ne se fera que par le biais d’un arrangement territorial douloureux pour les deux parties, mais tel est son prix. Monsieur Netanyahu vient de signifier qu’il ne comprend pas la sensibilité palestinienne à cet égard ou qu’il n’en a cure. C’est une faute stratégique, politique et morale. 

Stéphane Juffa, le directeur de Metula News Agency, que l’on peut difficilement considérer comme un ennemi d’Israël, a écrit très justement, ce matin : « La non extension du gel vient nous rappeler brutalement que c’est une coalition de droite, d’extrême droite et d’Edennistes qui détient le pouvoir à Jérusalem. Tant pis pour l’écrasante majorité d’entre nous qui - selon tous les sondages de ces dernières années -, subit une politique qu’elle ne partage pas… »

Nous n’avons ni l’intention ni la prétention, ici et maintenant, de définir quels sont les critères qui pourraient permettre d’arriver à la paix. La situation est complexe ainsi que viennent de me le rappeler plusieurs amis israéliens et palestiniens rencontrés il y a quelques jours au cours d’un voyage d’étude organisé par Interchange Project pour des experts européens en contre-terrorisme. L’un de nos interlocuteurs, le professeur Shlomo Avineri, qui fut Directeur Général du ministère des Affaires étrangères dans le gouvernement d’Yitzhak Rabin, estime quant à lui que le plus important n’est pas de négocier immédiatement sur les grands thèmes qui minent tout le processus de paix depuis plus de quinze ans – la colonisation, le tracé des frontières, le statut de Jérusalem, le caractère « juif » de l’Etat d’Israël – mais de reprendre ce dialogue trop longtemps interrompu et de l’aborder avec modestie, en recherchant de petites avancées et, surtout, en prenant le temps d’instaurer la confiance mutuelle sans laquelle il n’y aura pas de paix possible. Il a raison.

La décision de M. Netanyahu ne va clairement pas dans ce sens. Stéphane Juffa a-t-il raison quand il écrit : «Ce gouvernement ne fera pas la paix ? » On doit évidemment espérer que non. Mais en tout cas, il est certain que tant qu’il cédera aux ultra-religieux et aux partisans de son ministre des Affaires étrangères, M. Liebermann, la majorité des Israéliens resteront les otages des 10% d’entre eux qui ont fait le choix de la colonisation (et encore, beaucoup de ces colons sont sans doute là pour des raisons économiques : un habitat nettement moins cher que dans les frontières légales d’Israël).

Il n’en reste pas moins qu’une minorité vient, une fois de plus, de prendre le risque de nuire à l’image de l’Etat d’Israël et de mettre en danger les fragiles perspectives de paix en lesquelles on veut encore espérer.

 

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