Caricatures : Europe, où est ton courage ?



 

 

Pour l’Europe de la politique extérieure qui peine à se construire, la crise des caricatures de Mahomet est un test. A Damas, qui défie par ailleurs la communauté internationale depuis l’assassinat de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri, les ambassades danoises et norvégiennes sont incendiées sans que la police ne bouge le petit doigt pour les protéger. Copenhague proteste. La Syrie répond que tout cela c’est la faute aux Danois qui n’avaient qu’à présenter leurs excuses. A Gaza, une foule en colère met à sac la représentation de l’Union européenne tandis que les journalistes sont menacés de mort. Au même moment, on apprenait que la justice palestinienne recherchait 750 millions de dollars mystérieusement envolés des caisses palestiniennes (à cinquante millions près, l’équivalent du déficit budgétaire annuel de l’AP). C’est un peu comme si l’Europe avait payé l’essence (et aussi le briquet) des incendiaires. Au fond, c’est d’ailleurs ce qu’elle a fait. A Bagdad, le ministre des Transports annule tous les contrats de reconstruction octroyés au Danemark. Mais dans le même temps, 450 soldats danois (et un certain nombre d’autres européens) risquent leur vie pour assurer dans le pays une sécurité qui serait absolument inexistante si l’on s’en remettait à ces seuls Irakiens tellement sourcilleux.
En Iran, en Arabie saoudite, on ordonne des représailles économiques. Une crise, quatre situations. Mais quelle réponse européenne ? Bruxelles comprendra-t-il enfin que la puissance ne se sollicite pas mais qu’elle s’impose d’elle-même, d’abord par le respect ?
L’Union européenne est généreuse. Elle finance d’innombrables programmes d’assistance dans le monde et, entre autres, participe largement au budget de l’Autorité palestinienne (et, malheureusement, à la corruption de ses dirigeants).
Nombre d’Etats européens (dont le Danemark) ne manquent pas de courage et sont présents en Irak pour aider ce pays à se protéger et à se reconstruire. Et d’autres le sont en Afghanistan, pour les mêmes raisons. L’Union européenne défend le droit et tente avec plus ou moins de bonheur de jouer un rôle positif dans le monde, en aidant à résoudre les crises. Tout cela pour voir nos drapeaux brûlés, nos ambassades dévastées et des foules fanatiques réclamer le châtiment de quelques dessinateurs (il est vrai mal inspirés). Allons-nous laisser Riyad ou Téhéran nous donner des leçons de démocratie et de respect de la liberté d’expression ? Ou bien allons-nous, au contraire, enfin ? Réagir et dire par exemple à cette Autorité palestinienne désormais dominée par une organisation terroriste et qui reste comptable de 750 millions de dollars disparus (dont une bonne part venait d’Europe) : on ne peut à la fois prendre notre argent et nous insulter, voire nous agresser ?
Nous pensons, à l’ESISC, que la publication originelle des caricatures a été une erreur malheureuse. Nous pensons aussi que maintenant que le mal a été fait, il n’y a pas à transiger avec la liberté de la presse. Nous pensons enfin que, passé la colère légitime (mais uniquement quand elle s’exprime de manière modérée, dans les médias ou éventuellement dans la rue mais jamais en brûlant nos drapeaux ou, pire encore, et jamais en appelant au boycott), il est temps que quelqu’un rappelle au monde arabo-musulman une simple vérité. Mis à part quelques pays (la Turquie, l’Indonésie, le Maroc, la Jordanie, le Koweit, Barhein et deux ou trois autres…) vous n’êtes ni des démocraties ni même des démocraties en venir, l’état de vos institutions est lamentable et les droits de vos citoyens (et de vos citoyennes…) sont quotidiennement bafoués. Alors de grâce, gardez vos leçons pour vous. Vous voulez notre argent ? Vous réclamez notre aide ? Vous avez besoin de notre assistance ? Très bien, mais alors, au minimum, respectez-nous ! La récréation est terminée…

 


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