Mohamed Alhoumekani est en danger de mort, l'Union européenne doit exiger sa libération



 

 

Nous avons appris avec émotion, dans la nuit de dimanche 25 août à lundi 26 août, l’arrestation, samedi 24 août au Yémen, de Mohamed Saleh Alhoumekani, citoyen belge d’origine djiboutienne. Une délégation de Djibouti est arrivée dimanche à Sanaa pour prendre en charge M. Alhoumekani et le ramener à Djibouti où il est sous le coup d’une condamnation à la prison.

 

Le nom de Mohamed Alhoumekani, ami et collaborateur de longue date de l’ESISC,  est inconnu du grand public. C’est un homme simple qui élève ses enfants en gagnant durement sa vie à Bruxelles dans un emploi qui est très en dessous de ses qualifications. C’est aussi et surtout un homme juste et droit, et c’est ce qui lui vaut aujourd’hui d’être persécuté par les autorités de Djibouti avec la complicité de celles du Yémen.

 

Sa droiture l’avait conduit à dénoncer un crime d’Etat. Le 19 octobre 1995, le corps de Bernard Borrel, magistrat français détaché à Djibouti était retrouvé au pied d’une falaise, carbonisé. Les autorités locales avaient immédiatement conclu au suicide. Par lâcheté, la France avait suivi, le gouvernement de M. Chirac préférant préserver les bonnes relations qu’il entretenait avec un petit pays abritant la principale base militaire française de la région. Au moment de sa mort, M. Borrel, alors âgé de 39 ans, était pourtant en mission officielle, détaché auprès du ministre de la Justice pour enquêter sur un attentat qui avait coûté la vie à des militaires français quelques années auparavant. Mensonge d’Etat d’un côté, complicité, enquête truquée et pressions multiples de l’autre : Djibouti et Paris avaient rivalisé de bassesse dans cette triste affaire.

 

Le témoignage de Mohamed Alhoumekani, la détermination d’un nouveau juge d’instruction et l’engagement personnel du nouveau président de la République allaient tout changer.

 

Il y a quelques années nous écrivions[i] : « En 2000, un témoin clé sort de l’ombre: Monsieur Mohamed Saleh Alhoumekani, ancien officier de la garde présidentielle djiboutienne en exil –et dont nous honorons, à l’ESISC, qu’il soit aujourd’hui l’un de nos collaborateurs – affirme avoir entendu, le lendemain de la mort de Monsieur Borrel, dans les jardins du Palais présidentiel, une conversation accablante entre plusieurs hommes. L’un d’eux n’était autre qu’Ismail Omar Guelleh, à l’époque chef de cabinet du Président et responsable des services de sécurité. Guelleh est aujourd’hui président de la République. Ce 19 octobre 1995, des hommes de main venaient lui affirmer que « le juge fouineur » était mort et « qu’il n’y avait aucune trace ».

 

Entendu à plusieurs reprises au cours des années qui suivirent, Monsieur Alhoumekani ne devait jamais varier d’un mot dans ses dépositions.

Aussitôt élu, Nicolas Sarkozy avait fait de cette affaire une priorité et promis à Mme Elisabeth Borrel que toute la  vérité serait faite. Le soir même, le Parquet de Paris publiait le communiqué suivant : « Le procureur de la République de Paris, en accord et comme suite à la demande de Mme Sophie Clément, vice-présidente chargée de l'instruction de l'affaire Borrel, précise que si la thèse du suicide a pu être un temps privilégiée, les éléments recueillis notamment depuis 2002 militent en faveur d'un acte criminel. »

 

L’enquête, depuis, s’est poursuivie sous la direction de la juge Clément. Mohamed Alhoumekani en était et en reste un témoin-clé.

 

C’est ce que, aujourd’hui, on veut lui faire payer. Il est évident pour tout un chacun que si M. Alhoumekani était transféré à Djibouti, son intégrité physique et, sans doute, sa vie, seraient gravement menacées. Ni la France dont il a aidé la justice avec constance, ni la Belgique dont il a la nationalité ne peuvent laisser commettre ce nouveau crime.

 

L’Union européenne doit exiger la libération immédiate et sans condition de Mohamed Alhoumekani et son retour en Europe.

 

 

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[i] Bernard Borrel : la vérité, douze ans après ! (éditorial de l’ESISC, le 20 juin 2007)

 

 

 

 


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