Pourquoi le Tchad d'Idriss Déby doit être défendu



 

 

Depuis quelques jours, la crise larvée qui oppose, au Tchad, un gouvernement légitime – celui de M. Idriss Déby – et une « opposition » armée (donc, par nature dans un régime en transition, illégitime) a pris une nouvelle dimension. Après plusieurs offensives sans lendemain, au printemps et à la fin de l’été, on apprenait ce week-end que l’une des composantes de la guérilla, l’Union des Forces pour la Démocratie et le Changement (UFDD) avait attaqué et brièvement occupé la ville d’Abéché qui, à 700 kilomètres de la capitale, fait figure de « verrou » sur la route de N’Djamena. Par ailleurs, et bien que les informations relatives à ce deuxième « front » soient contradictoires, une colonne du Rassemblement des Forces Démocratiques (RAFD, animé par deux anciens proches de M. Déby, les frères Tom et Timan Erdimi qui avaient été impliqués dans une tentative de putsch découverte à la mi-mai 2004) aurait fait mouvement vers N’Djamena. Toujours est-il que ce lundi, les forces légales avaient pris position autour de la capitale et autour des principaux bâtiments publics dans le but de les protéger.

Qu’on ne s’y trompe pas, il ne s’agit pas, comme trop souvent en Afrique, d’une énième querelle de chefs de guerre se battant pour le partage du gâteau. Il s’agit de l’affrontement entre deux modèles de société.

Arrivé au pouvoir en décembre 1990 après une trop longue guerre civile (elle a duré trois décennies), le président Idriss Déby a entamé, depuis une dizaine d’années, une véritable transition vers la démocratie. Certes, rien n’est parfait au Tchad, mais si l’on considère objectivement d’où vient ce pays et les difficultés à surmonter (la traditionnelle rivalité nord-sud, le clanisme, la corruption endémique, une culture de la violence nourrie et entretenue par la guerre civile, les dangers régionaux), alors il faut bien se rendre à l’évidence : le « mieux » est incontestable.

Combien de pays de la région peuvent-ils s’enorgueillir d’avoir inscrit dans leur constitution le fait d’être une République « laïque »,  « fondée sur les principes de la démocratie, le règne de la loi et de la justice ? » Dans combien de pays de la région la même constitution établit-elle (article 27) que : « Les libertés d'opinion et d'expression, de communication, de conscience, de religion, de presse, d'association, de réunion, de circulation, de manifestations et de cortèges sont garanties à tous » ? Et il ne s’agit pas que de mots. A N’Djamena, existent une presse privée et libre, une société civile vivace et des dizaines de partis politiques (dont une demi-douzaine ont un poids effectif) parfois très hostiles au pouvoir. Certes, M. Déby pourrait mieux faire, et certes, l’état d’urgence instauré le 13 novembre et prolongé pour six mois dans la soirée du 23 novembre a un goût amer et menace cette fragile démocratie. Mais faut-il rappeler qu’elle est en bute, depuis des mois, aux incursions et agressions de mouvements armés ? Et pense-t-on vraiment que ceux qui entendent, aujourd’hui, arriver au pouvoir par la force, feraient mieux que l’actuel président ?

Faut-il vraiment rappeler, enfin,  que ces mouvements sont, pour une bonne part, soutenus, armés et financés par le Soudan islamiste ? Le régime génocidaire de Khartoum tente ainsi d’élargir ce que l’on appelle pudiquement la « crise du Darfour » afin de dissuader le monde d’y intervenir et de neutraliser un pays qui serait bien placé pour être la base arrière d’une opération d’envergure destinée à sauver les populations noires du Darfour de la sauvagerie des milices arabes Janjawid.

C’est parce qu’il est laïc dans une région où l’islamisme menace et progresse, qu’il est démocratique (même imparfaitement) dans une zone où la démocratie est un luxe, qu’il est légitime sur un continent où les pouvoirs élus se comptent sur les doigts de la main, que le régime du président Déby doit être soutenu.

Mais il ne suffit pas de mots. La nécessaire solidarité de la communauté internationale devrait prendre la forme d’une assistance militaire décisive. Et c’est bien entendu vers la France, acteur politique de longue date au Tchad, que tous les regards se tournent.    


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