Un spectre hante l'Europe : celui du racisme



 

 

Aujourd’hui, le racisme tue. Face à cette haine qui s’exprime ouvertement, nos politiques portent une lourde responsabilité. C’est leur impuissance à appliquer la loi et à régler les problèmes qui suscite rancœur et animosité. C’est le déficit abyssal d’éducation à la citoyenneté qui permet à ces bas sentiments de prospérer et de contaminer la jeunesse. C’est la non application de la loi et la faiblesse du système dit « répressif » qui permet à ces idées de se muer en instrument de mort. C’est le laxisme de la réponse de la société au crime, enfin,  qui donne aux assassins le « courage » de passer à l’acte.

Hier, 11 mai, à Anvers, ville de culture et de création, Hans Van Temsche un jeune skinhead de 18 ans,- par ailleurs neveu de Frieda Van Temsche, parlementaire d’extrême droite du Vlaams Belang (ex Vlaams Blok) et fils d’un militant également de cette mouvance – a ouvert le feu sur une jeune fille au pair africaine d’origine malienne, Mata N’Doyie et sur Luna, l’enfant de deux ans qu’elle promenait. Toutes deux sont décédées sur les lieux du crime. Juste avant ce double tir fatal, Van Temsche avait dirigé son arme vers une femme turque qui lisait un livre tranquillement assise sur un banc et qui a été grièvement blessée au ventre (ses jours ne sont plus en danger). Le jeune homme a ensuite été blessé par la police et arrêté. La veille de cet acte horrible, le corps d’un jeune Marocain disparu après une altercation apparemment raciste avait été retrouvé dans l’Escaut. Il y a cinq jours, c’est à Bruges que cinq skinheads ont tabassé un Français d’origine africaine, qui se trouve toujours aux soins intensifs. Le 4 mars 2006, à Lyon, c’est un père de famille algérien qui était abattu à l’entrée d’un café. En février, l’affaire Halimi horrifiait la France.

Arrêtons là cette sinistre litanie.  Que les victimes soient arabes, africaines ou juives, ces crimes ont un point commun. Il s’agit de ce que l’on appelle aux Etats-Unis des « crimes de haine ». Après la mort d’Ilan Halimi, nous écrivions, dans une note d’analyse consacrée à l’hyper violence : « Ce que l’on appelle aux Etats-Unis les Hate crimes - crimes motivés par la haine, contre une minorité religieuse ou ethnique, une nationalité ou un « genre » (femmes, homosexuels, etc.) - fait malheureusement partie de l’évolution négative de nos sociétés. Celles-ci se déstructurent et sont, pour certaines, en voie de décadence avancée. Dès lors, l’affirmation extrémiste ou violente de son identité propre et la négation de celle de « l’autre» deviennent les seuls repères qui, chez certains, viennent palier l’absence d’identité collective, l’effacement des normes et les insuffisances réelles ou supposées de l’Etat ou de la société. Dans ce contexte, et dans celui de la montée des extrémismes, l’antisémitisme, la haine raciale, l’homophobie et la violence envers les femmes ont un avenir ». L’actualité nous donne, malheureusement, raison.

Il n’y a là aucune fatalité mais, bien au contraire, une conséquence de la démission de nos gouvernants. Si le racisme peut s’instiller dans la société c’est que les lois le condamnant sont appliquées avec laxisme voire pas appliquées du tout. Si des esprits faibles peuvent être convaincus de la justesse de ces idées nauséabondes, c’est que la réponse de l’Etat face à certains vrais problèmes (l’immigration, clandestine et la montée de l’islamisme, par exemple) manque de force, pour dire le moins et autorise toutes les propagandes. Et l’on ne citera que pour mémoire la quasi inexistence des cours d’éducation civique. Si les plus extrémistes des extrémistes peuvent se rassembler et pratiquer une perverse émulation, c’est que leurs organisations sont insuffisamment surveillées. Et s’ils passent à l’acte, c’est, trop souvent, parce qu’ils savent qu’ils risquent peu. Prenons ce jeune Van Temsche qui vient de tuer une enfant et une femme et d’en blesser grièvement une autre femme. S’il est reconnu responsable de ses actes et jugé,  il sera très probablement condamné à la perpétuité, on ose du moins l’espérer. Mais qu’elle sera la durée réelle de cette « perpétuité » ? Huit ans ? Douze ans ? Certainement moins de quinze ans en tout cas si l’on se réfère à la manière dont les peines sont généralement appliquées.

Aujourd’hui, les politiques belges se lamentent comme, après l’affaire Halimi, l’ont fait les politiques français. C’est un peu court. Comme il est regrettable qu’ils semblent, à nouveau, découvrir l’ampleur du problème. Une société démocratique n’attend des dirigeants qu’elle s’est librement choisis ni larmes de crocodile ni sympathie ni condoléances. Elle attend des actes et des solutions.


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